Retournant vers sa planque

Après des années de chasse, le démon Malik avait enfin retrouvé la piste d’une de ses proies. Celle-ci avait quelque chose de spéciale, il la chassait depuis sa naissance. C’était une femme… Le démon se matérialisa dans une ruelle sombre de la ville. Il se retrouva près d’une vielle bâtisse, peut-être une ancienne usine aujourd’hui absente d’activité. Il pleuvait, les cheveux noirs du démons dégoulinaient d’eau de pluie, son manteau était trempé, il marcha dans une flaque d’eau en s’approchant de l’usine.
Il poussa la porte du bâtiment qui s’ouvrit en un grincement sinistre. Vu de l’intérieur, la silhouette du démon n’était dessinée que par ses cheveux ruisselant et son long anorak. Scrutant rapidement les lieux dans l’obscurité, il ne vit rien. Le vieil entrepôt n’était éclairé que par les rayons de la lune pénétrant à travers les vitres parfois brisées.

« Je sais que tu es là, montre-toi, ordonna –t – il d’une voix grave et rauque. »

Il fit quelque pas qui résonnèrent et resta sur ses gardes, attentif à tout mouvements.

La proie du démon ne se montra pas. C’était à prévoir, comme à chaque fois, il fallait tout faire par soi-même. Il allait essayer de la débusquer lorsqu’il vit une ombre, celle de la jeune fille, disparaître à l’entrée de l’usine. Il se précipita dehors, à la poursuite de cette ruse. Il était convaincu que c’était un piège. La sorcière avait déjà utilisé ce subterfuge auparavant. Il courut quand même à l’extérieur. Il le fallait s’il voulait que son piège à lui fonctionne…

Une fois dehors, comme il s’y attendait, il ne vit personne. Il décida donc de mettre son plan à exécution : il éclata, littéralement, en millier de grains de sable. Ces grains mirent seulement quelques secondes pour se réunir et former une longue et fine ligne blanche qui se déplaçait sur le sol mouillé par la pluie qui ne cessait pas.

Cette traînée retourna dans l’usine en prenant soin de longer les murs. Elle demeura invisible, dans l’ombre. Le démon n’avait plus qu’à attendre que la sorcière croit qu’il fut parti et sorte de sa cachette.

Le démon rampait sur le sol à la manière d’un serpent. Il se déplaçait seulement aux pieds des murs en produisant un léger bruit de frottement. Un bruit très particulier, à peine audible et identifiable… Toujours rien, il ne la voyait pas. Le démon commença à se poser des questions. L’ombre de tout à l’heure était réellement une feinte ou bel et bien la sorcière ? Etait-t-elle toujours cachée ici ? Ne s’était-elle pas enfuit ? Il n’était plus sûr de rien.

La pluie continuait de tambouriner sur le toit fait de taules de l’usine. Le bruit produit devenait de plus en plus assourdissant. Il commençait à s’impatienter. Pourquoi cela mettait-il autant de temps ? Bientôt l’énervement le gagna. Il se demanda s’il n’irait pas plus vite en changeant la structure de l’usine en un immense tas de sable. Mais finalement, il se ravisa. Ce serait trop suspect aux yeux des mortels. Et oui, même les créatures du mal se souciaient de se secret. Car contrairement aux êtres bénéfiques, eux mourraient pour leurs fautes.

Malik réfléchissait, que pourrait-il bien faire pour la débusquer ? Il voulait que ça aille vite. Pourquoi fallait-il toujours que ce soit si long ? Il scrutait l’obscurité. Ne voyant toujours rien, il décida de se déplacer de l’autre côté du bâtiment. Et là, malgré de bruit de la pluie qui s’abattait sur le toit il put distinguer un léger souffle, régulier… Le souffle d’une respiration. Il en était sûr, elle était là, tout proche. Mais il ne la voyait pas, il ne le pouvait pas. S’il avait été sous forme humaine, un rictus se serait formé sur son visage. Il allait l’avoir…

Toujours attentif au souffle de la respiration de la sorcière, Malik avançait lentement, il la suivait, elle se dirigeait vers la sortie de derrière. Il ne la voyait pas mais savait pourquoi. Depuis le temps qu’il la traquait… Elle se dirigeait donc vers l’extérieur. L’impatience qu’il avait en lui quelques minutes auparavant avait laissé place à une grande joie. La sorcière était sur le point de commettre une erreur…

Elle se trahit lorsqu’elle ouvrit la porte de la sortie. En effet de ce côté-ci, les rayons de la lune éclairaient la façade et donc, faisaient disparaître les ombres. Malik voyait le corps de la sorcière apparaître lentement, de bas en haut, comme si un voile invisible se levait. Peut-être n’en avait-elle pas conscience. Il ne sortit pas aussitôt de sa cachette pour fondre sur elle. Il préférait attendre qu’elle avance encore un peu pour ne pas qu’elle puisse se cacher à nouveau dans les ténèbres. L’heure de la sorcière arrivait à grands pas.

Ca y est, la sorcière, avait bouger. Malik reprit rapidement sa forme humaine et se lança à la poursuite de sa proie. Il arriva dehors. Il pleuvait toujours. Il s’avança dans la ruelle et se retourna pour voir la sorcière sur le toit. Un sourire se dessina sur ses lèvres. Elle était là, devant lui. Elle apparaissait clairement, fuyant sous le clair de lune. Il lui lança :

« Arrête-toi ! Tu ne peux pas m’échapper. »

Un rire cruel et moqueur sortit de sa bouche dans la nuit silencieuse. Malik, leva un bras, main ouverte, en direction de la sorcière. Un puissant jet de sable sortit de sa paume et fonda en direction de la jeune fille.

Malik regardait son jet de sable. Une seconde jeune fille apparût de nulle part et failli se faire toucher. Décontenancé un instant, il ne vit pas où partit Shar, la sorcière qu’il chassait. D’abord il ne comprit pas vraiment ce qui se passait : la jeune femme sotie de nulle part ne parut pas plus étonnée que ça de voir du sable jaillir d’un homme. Et puis il comprit…

Elle projeta sur lui une boule de feu. Pour se protéger, il créa une sorte de cage, faite de verre, autour de lui en levant les bras au ciel. La partie devant lui explosa au contact de la boule de feu mais celle derrière resta intacte. A peine remis du choc, un second fit exploser le reste de la cage dans son dos. Il sursauta et fit volte-face. Il ne vit rien et resta sur ses gardes. Mais il ne devait pas laisser une seconde chance d’attaquer à la pyromane.

Il tendit une main face au sol et tous les débris de verre se mirent à léviter autour de lui jusqu’à ce qu’il fasse un geste brusque de la main. A ce moment précis, tous les morceaux de verre furent éjectés autour du démon. Qu’allait faire la sorcière face à cela ? Et peut-être l’autre aussi, si elle était encore dans les parages. Ensuite pour éviter de se faire surprendre une seconde fois par une attaque dans le dos, il transforma son corps en sable.

Malik ressentit une intense chaleur en lui. Elle était de nature magique. Tout d'un coup, il explosa en milliers de grain de sable comme un peu plus tôt dans la nuit. C'était une chose habituelle pour lui, mais d'habitude, c'était lui qui produisait ce phénomène, pas une sorcière. Car il était convaincu que s'était la sorcière qui lui avait lancé la boule de feu qui avait fait ça. De toutes manières, elle était blessée, il l'avait vu. Ses projectiles de verre avait atteint sa cible. Il fallait en finir avec elle.

Il décida de ne pas reformer son corps de suite mais préféra ramper sur le sol pour la surprendre. Les grains de sable se rassemblèrent en une sorte de flaque de sable. Cette flaque s'élargit et se déplaça rapidement vers la pyromane. Arrivée à quelques mètres d'elle, la flaque s'éleva pour ainsi former une vague constituée de sable et la percuta, l'ensevelissant sous un centimètre de sable.

Malik reconstitua son corps à une petite dizaine de mètres de la sorcière ensevelie et contempla son oeuvre. Un sourire mauvais se dessina sur son visage. Elle n'avait qu'à pas se mêler de ce qui ne la regardait pas. Elle n'avait obtenu que ce qu'elle avait semé. Maintenant qu'il pensait que c'était terminé, il chercha des yeux sa proie principale mais ne la vit pas. Il continua ses recherches en s'enfonçant plus profondément dans la ruelle.